Depuis quelques jours, j'accompagne Mathieu et Vincent au stage de "remise en forme" du club montagne de l'université. Enfin dans mon cas, c'est plutôt un stage de "mise en forme". Donc tous les soirs à partir de 9h15, qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il neige, une bande de courageux chinois (une trentaine de garçons et une dizaine de filles) se réunit au stade ouest, stade plongé dans l'obscurité étant donné le cruel manque d'éclairage public.
Le programme est simple: lundi, mercredi et vendredi c'est séance de tractions, mardi et jeudi c'est course d'endurance. En gros, on est là pour se faire mal et si possible quand il fait -11°C au thermomètre parce que sinon c'est pas rigolo. Le vent n'arrange pas les choses bien sûr parce que quand on peut courir par de telles températures, on peut aussi le faire avec des bourrasques de vent d'ouest qui vous grignote le moindre bout de peau n'ayant pas été préalablement protégé, et ceci à chaque fois que vous passez le virage nord-est, ce qui malheureusement arrive une douzaine de fois quand on fait des séances de douze tours de stade.
Par contre, qu'est ce qu'on se marre. On encourage les filles qui trainassent en criant "Mei nü! Jia you!" (ce qui, en langage du 94, se traduit par "Eh coquine! bouge ton lard!"), on crache ses poumons en parfaite synchronisation avec ses camarades de bagne, etc...
Et puis il y a aussi les tractions ou "comment est ce que je fais quand mon bras gauche refuse catégoriquement de se contracter alors qu'il me reste quatre séries". Et bah on fait comme les chinois, on se fait aider et tout ça dans la bonne humeur. On encourage aussi le petit chef du groupe (1m50, 55kg, record personnel: 39 tractions) lors de ses démonstrations de force et de souplesse.
Viennent ensuite les exercices pour se muscler le mollet. Le principe de la méthode chinoise est simple: si ça fait mal, c'est bon signe et ça veut dire que tu as gagné le droit de m'en refaire deux séries de 80 et 90. Ils ont vraiment une volonté de fer (ou la flemme de se rebeller, ça dépend du point de vue) et c'est pour ça qu'ils domineront le monde d'ici 20 ans, d'où l'intérêt de se mettre dans leurs petits papiers dès maintenant *ce message subliminal vous est offert par l'organe média du PCC*.
L'esprit de groupe est très présent et surtout quand, pendant qu'on en est arrivé au point où on implore Satan de nous libérer de notre misère, une jeune élève au regard espiègle passe son temps à tourner autour du groupe en trimballant des sacs plastiques pleins d'objets ronds non identifiés. Ce n'est autre que Mlle Asymétrie, la preuve vivante que le traffic de drogues douces ne s'arrête pas aux portes de l'université. En effet, cette joyeuse illuminée arbore en permanence deux boucles d'oreille différentes à chaque oreille (si possible les plus grosses et voyantes possible), un sourire carnassier sous une paire de lunettes en cul de bouteille et, pour couronner le tout, une coupe de cheveux de Cléopatre sous LSD, coupe que je la soupçonne d'entretenir elle-même étant donné l'irrégularité du tracé.
Après nous être réuni autour du chef, ce dernier fait un discours incompréhensible immédiatement suivi d'un rituel qui, aux yeux du profane, relève de l'humiliation publique. Il paraît que machin et machine sortent ensemble et ils ont prévenu personne? Qu'on les jette au centre du cercle et qu'on se moque copieusement d'eux pendant 5 bonnes minutes. Chacun y va de sa petite vanne et l'homme, fidèle à sa réputation, laisse sa meuf se démerder pour expliquer la situation. Comme compensation, ils reçoivent un des objets ronds jalousement gardés par la Courtney Love chinoise. Intrigués, nous osons croiser le regard du chef de groupe. Celui-ci nous grille immédiatement et se met à hurler à la mort pour que nous venions le rejoindre au centre de l'arène. Après une vague explication de nos origines respectives, nous sommes libérés à moindre frais et recevons, ô joie, le gage de notre réussite: l'objet rond. Après l'avoir libéré de son papier protecteur, nous découvrons avec horreur ce qu'il contenait: une poire bien fraîche. Quelles enflures.
Différents regards sur Taiwan
Il y a 10 ans
4 commentaires:
C'est pour ton bien...
Comment tu crois que j'ai développé un tel corps de rêve ? Ces muscles interosseux dorsaux d'acier, ces lombricaux saillants, ces éminences thénars parfaitement dessinées. Tout ça est le produit d'un entrainement quotidien et rigoureux. Bien sur la nature nous a doté d'un avantage génétique (merci Il Padre... -_-) mais cela ne fais pas tout. Le mental doit y être aussi.
Gardez bien à l'esprit que vous faites ça pour la gloire du président Mao et tous vos maux disparaitront.
J'ai pas bien compris la chute, moi... quelqu'un peut m'expliquer le sens subliminal de la poire?
Oui, c'est carrement suspect. Serait-ce une sorte de secte?
En tout cas, ici ca ne marche pas pareil: a part quelques illumines qui comme vous, tentent l'entrainement a la batman, la plupart des gens vont au "gym", donc au chaud, et "work out" pendant des heures. La piscine aussi, c'est bien. Et pas de dealeuse pour vous refiler des poires bourrees au gingembre!
Y a pas de salle de sport couverte a Tsinhua? (j'imagine que non, si vous allez dehors, mais je veux juste m'assurer que vous n'etes pas completement maso :D)
Bien sûr que si il y a des salles de sport couvertes. Mais c'est nul de soulever de la fonte. Nous on veut se remettre en forme tout en attrapant une pneumonie (un mal pour un bien).
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